Collage antipub, vu à Paris, avec l’accord de l’artiste

« Apprends à regarder plus loin que les apparences
pour accéder à la racine des choses »

PAUL KLEE

Un beau vêtement impressionne les impressionnables, beaucoup font les hommes-sandwichs pour des entreprises capitalistes dénuées d’éthique. À l’école, un enfant peut contribuer à la propagande, mais on lui demandera par exemple de ne pas porter de vêtement affichant le visage de Che Guevara. Dans le même temps, les élites s’appliquent au no logo, car « la beauté d’aéroport c’est tellement vulgaire ». Les marques provoquent des désirs que le capitalisme nous fait passer pour essentiels, et c’est parce qu’ils nous méprisent, qu’ils peuvent s’enrichir sur notre dos, en nous faisant acheter des produits qu’ils ne voudraient pas pour eux-mêmes ou pour leurs enfants. Elle est pas belle la vie ?

Le petit bourgeois s’habille souvent en friperie. Il sait qu’on y trouve à petit prix des vêtements de meilleure qualité que ce qui s’écoule aujourd’hui sur le marché, et qu’au besoin, il fera travailler le tailleur pour ajuster. Dans le même temps, celui qui a manqué, qui a connu le mépris et la honte de ne pas être habillé comme les autres, se refuse aux habits de seconde main, alors même que nous devrions consommer mieux et moins. Est-ce à dire que ceux qui souffrent le plus de l’exploitation capitaliste en sont les meilleurs porte-drapeaux ? Il faudra leur dire.

L’effet de halo est la première impression que nous avons de quelqu’un. Si je me présente sapée avec des codes différents des tiens, dans le meilleur des cas tu ne m’accorderas aucune attention. Je possède pourtant une chose invisible pour les yeux qui me conduit à me moquer de ce que ton regard te dit de moi, à ne pas me soucier de tes préjugés à mon égard. L’éthique est une chose qui ne s’achète pas, une de ces choses qui n’a pas de prix. C’est mon bien le plus précieux qui produit des effets estimables.

Dans l’idéal, on ne porterait pas de jugement sur l’autre d’après sa beauté, son statut social, son allure, la couleur de sa peau, sa façon de s’exprimer, son accent, etc. Nous agissons à l’inverse de cet idéal, inutile de lister les phobies qui en découlent. On a beau savoir que l’habit ne fait pas le moine, que la qualification ne fait pas l’esprit logique, que le statut ne fait pas la sincérité, que l’état dentaire ne fait pas l’intégrité, naturellement nous mésestimons, ou au contraire, surestimons l’autre, d’après son apparence et la perception que nous en avons.

Nous sommes pétris de préjugés, responsables de nos jugements hâtifs, de nos raccourcis grossiers, de notre mépris. Dans ce monde où la domination est partout, nous sommes nous-mêmes affectés par ce mal contre lequel nous luttons. De même qu’un bon parfum masque l’odeur naturelle d’un corps et peut induire en erreur dans le choix d’un.e partenaire – question d’alchimie –, méfie-toi de tes jugements hâtifs. Garde-toi de méjuger l’autre sur son apparence, qu’elle t’impressionne ou te semble méprisable. Admirer ou mépriser sont des sentiments naturels, mais quand ils s’éveillent en toi, tu te vois être et à ce moment-là, il est possible d’ajuster ton regard. Il faudrait voir à ne pas placer nos espoirs de justice dans des méprisants qui s’ignorent.

Toi qui combat un « isme », mais qui ne t’es pas gênée pour t’illustrer de façon crasse face à mon amie qui n’avait pas tes codes, garde ça en tête, ça t’évitera une autre fois de passer pour une méprisante, et puisqu’il faut le dire, j’assume d’endosser ce rôle ingrat. Le capitalisme nous épuise, nous méprise, nous domine, nous influence, nous rend malheureux, bêtes et méchants. Nous sommes cons mais pas condamnés à le rester. Paraître n’est pas Être. La révolution passera par l’Être ou ne passera pas.

Antipub
All Rights Reserved – Anti-advertising sticker, Paris "buy things you don't need, with money you don't have, to impress people who don't care"

no logo

“Learn to look beyond the appearances to get to the root of things”

PAUL KLEE

A beautiful garment impresses the impressionable, many make human billboards for unethical capitalist enterprises. In school, a child can contribute to the propaganda, but for example, they will be asked not to wear clothes with Che Guevara’s face on them. At the same time, the elites apply themselves to the no logo, because “airport beauty is so vulgar”.

Brands provoke desires that capitalism makes us think are essential. And it’s because they despise us that they can get rich off our backs, by making us buy products that they wouldn’t want for themselves or for their children. Isn’t life beautiful?

People from the middle class often dress in thrift stores. They know that they can find better quality clothes than what is sold on the market today, and that they will have the tailor adjust them if necessary. At the same time, the one who has missed out, who has known the contempt and the shame of not being dressed like others, refuses to buy second-hand clothes, even though we should consume better and less. Does this mean that those who suffer the most from capitalist exploitation are its best standard-bearers? Perhaps we’ll have to tell them.

The halo effect is the first impression we have of someone. If I present myself with dress codes different from yours, at best you won’t pay any attention to me. Yet I have something invisible to the eye that leads me to not care about what your gaze reveals about me, that leads me to not care about your prejudices against me. Ethics is something that cannot be bought, being one of those things that has no price. It is my most precious possession that has an considerable effect.

Ideally, we wouldn’t judge another person based on their beauty, social status, appearance, skin color, manner of speech, accent, and so on. We act in the opposite way to the way we do. We act in the opposite way to this ideal, and there is no need to list the phobias that result from it. We may know that clothes don’t make the man, that qualifications don’t make the logical mind, that status doesn’t make sincerity, that dental health doesn’t make integrity, but naturally we underestimate or on the contrary we overestimate others, according to their appearance and the perception we have of them.

We are full of prejudices, responsible for our hasty judgments, our crude shortcuts, our contempt. In this world where domination is everywhere, we ourselves are affected by this evil against which we fight. Just as a good perfume masks the natural smell of a body and can mislead in the choice of a partner—a question of alchemy—you must be wary of your hasty judgments.

Beware of judging others on their appearance, whether they impress you or seem contemptible. Admiring or despising are natural feelings, but when they are awakened in you, you see yourself and at that moment it is possible to adjust your look. We shouldn’t place our hopes of justice in contemptuous people who ignore themselves.

You who fight against an ‘-ism’ but did not hesitate to illustrate yourself in a crass way to my friend who did not have the codes. Keep that in mind, it will save you from being considered a contemptuous individual. Since it must be said, I assume this ungrateful role. Capitalism exhausts us, despises us, dominates us, influences us, makes us unhappy, stupid and nasty.

We are stupid but not condemned to remain so. To appear is not to be. The revolution will pass by the being or will not pass.

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